Sankai Juku : un voyage hors du temps (TCE)

Sankai Juku, une compagnie entre ciel et terre © Sankai Juku / Théâtre des Champs-Elysées

La compagnie Sankai Juku investit le Théâtre des Champs-Élysées pour présenter sa nouvelle création, « Arc : Chemin du jour ». Une parenthèse méditative et contemplative qui fait l’éloge de la lenteur.

Changement d’ambiance radicale au Théâtre des Champs Elysées, moins d’un mois après la venue du Boston Ballet. La chorégraphie revigorante sur fond de musique R&B de Playlist (EP), la dernière création de William Forsythe, a laissé place à l’ambiance contemplative de la célèbre compagnie japonaise Sankai Juku. La troupe d’Ushio Amagatsu, connue pour ses rituels chorégraphiques mêlant danses traditionnelles et expérimentations contemporaines, est actuellement à Paris pour présenter sa nouvelle œuvre, Arc : Chemin du jour, une pièce méditative qui nous transporte hors du temps.


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Les spectateurs venus chercher un peu d’exotisme n’ont pas été déçus, tant le dépaysement offert par Arc : Chemin du jour est total. Loin d’offrir une interprétation claire et univoque, les titres énigmatiques des sept tableaux qui composent le spectacle – « Il pleut sur mon étoile », « Étendue sereine au-dessus d’un océan de lave » ou encore « Atteindre le crépuscule » – sont autant d’invitations à s’abandonner à l’art énigmatique de Sankai Juku. Avec cette nouvelle création, la compagnie japonaise nous convie en effet à un voyage mystérieux au cours duquel tous nos repères, spatiaux comme temporels, sont mis à mal.

Éloge de la lenteur

La scénographie minimaliste, inspirée du tableau Atterrissage et amerrissage de Natsuyuki Nakanishi, nous plonge dans un espace inconnu et anonyme. La scène, recouverte d’une fine couche de sable beige, est surmontée de deux arcs métalliques mobiles énigmatiques. Des petits tas de sable amassés aux coins du tatami délimitent sur le plateau l’espace quasi sacré au sein duquel évoluent les danseurs. La présence de balances suspendues à des fils, symboles pour diverses cultures du passage dans l’au-delà, vient renforcer la sensation de se trouver dans un espace intermédiaire, entre terre et ciel.


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Les danseurs, à moitié nus pour la plupart, le crâne rasé et le corps tout blanc, ont tout l’air de moines tibétains albinos venus d’un autre monde. Leurs corps sont enduits d’une poudre blanche qui leur confère un teint sépulcral. Les fines particules de leur maquillage, qui se désagrègent au fil des mouvements, forment autour d’eux un nuage vaporeux et opalescent mystérieux. Les danseurs, qui semblent en osmose avec l’univers, s’adonnent à une sorte de rituel sacré, entre méditation et contemplation, portés par une musique new age. Une profonde sérénité émane de leurs chorégraphies, comme si leurs corps se laissaient porter par le flot tranquille des vagues ou le souffle du vent. Seul ou à plusieurs, ils naviguent entre harmonie et chaos, alternant mouvements fluides et gestes désarticulés.

On se laisse bercer par ce rituel mystérieux et apaisant, sans trop vraiment comprendre de quoi il s’agit, en ayant l’intime conviction d’assister à une expérience qui transcende la danse.


Arc : Chemin du jour, nouvelle création de la compagnie Sankai Juku. Chorégraphiée par Ushio Amagatsu. Au Théâtre des Champs Élysées jusqu’au 4 mai 2019 : https://www.theatrechampselysees.fr/la-saison/danse/sankai-juku

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